Depuis 2005, on recense à chaque élection générale municipale des articles et des reportages alarmants, référant notamment à une « crise de la démocratie locale ». Si le passé est garant de l’avenir, un regard « pessimiste » sur les élections municipales de 2017 trouvera écho dans les médias.
À juste titre, la corruption, la faible participation électorale et la prédominance masculine dans les conseils municipaux seront, entre autres, dénoncées. Pour expliquer la situation, on invoquera le cynisme, le désengagement et des contraintes systémiques. Motivé par l’amélioration de nos institutions démocratiques locales, ce regard critique est essentiel. La défense de nos valeurs démocratiques ne peut pas s’appuyer que sur la législation et les institutions. La vigilance, notamment des citoyens et des journalistes, demeure fondamentale. Plusieurs indicateurs permettent néanmoins d’adopter une position nuancée. Sans verser dans la candeur et la naïveté, il est bon de les rappeler pour faire contrepoids à un discours qui pourrait justement encourager le cynisme. L’engagement politique au-delà de la participation électorale En fonction des tendances observées à partir des données recueillies par le ministère des Affaires municipales et de l’Occupation du territoire (MAMOT) auprès des présidents d’élection, on peut estimer qu’environ 13 500 personnes brigueront l’un des quelque 8 000 postes d’élus à pourvoir. Une part importante de ces candidatures se présentera sous la bannière de l’un des 150 à 200 partis politiques municipaux, qui mobiliseront des milliers de militants et employés. À cela s’ajoutent les équipes d’organismes locaux, régionaux et nationaux, qui s’emploient déjà d’arrache-pied à promouvoir la participation électorale ou à inciter les jeunes et les femmes à soumettre leur candidature. Sans difficulté, nous venons d’identifier au moins 20 000 personnes qui s’impliqueront activement aux prochaines élections municipales. Prétendre qu’une part importante de ces personnes soit malintentionnée serait excessif. Au contraire, elles seront mues, sauf exception, par un désir de contribuer au développement de leur communauté. Cette dernière affirmation s’applique aussi aux milliers d’employés électoraux. La médiatisation d’irrégularités électorales et la tentation de généralisation pourraient cependant entacher leur réputation et celle des élections en général. Mais à moins d’un dérapage majeur, ces irrégularités constitueront en réalité l’exception, inhérentes à l’ampleur de la tâche et à la présence de nombreux êtres humains impliqués dans le processus. Le niveau d’engagement civique de toutes ces citoyennes et tous ces citoyens n’est pas négligeable. L’aspect quantitatif et qualitatif de ce constat doit être apprécié avant de conclure à une crise ou un désengagement politique justifiés par la faiblesse du taux de participation électorale. Quand on se compare… Plusieurs autres indicateurs, toujours selon les chiffres du MAMOT, tendent à témoigner d’une certaine vitalité de la démocratie représentative municipale québécoise :
Bonifier les perspectives d’intervention La proportion d’élus sans opposition est-elle préoccupante ? Pas nécessairement lorsque l’on considère la taille de certaines municipalités[1]. Doit-on se satisfaire d’une participation électorale sous le seuil de 50 % et d’une représentation féminine de 30 % dans les conseils municipaux ? Poser la question, c’est y répondre ! Les interventions visant à résoudre ces problèmes ont cependant intérêt à prendre en considération et à promouvoir les indicateurs plus encourageants. En effet, identifier et admettre les progrès permet de reconnaitre l’efficacité de certaines initiatives antérieures. Les meilleures pratiques pourraient ainsi être valorisées au lieu de réinventer la roue. De plus, l’actualité, en soi, favorise suffisamment le cynisme. Il n’est pas nécessaire d’alimenter de fausses perceptions. Inversement, la diffusion de certains faits pourrait inciter à l’engagement politique. Par exemple, savoir que plus de 4 000 femmes devraient soumettre leur candidature en septembre prochain pourrait avoir un effet positif dans la réflexion de celles qui hésitent à le faire. Jusqu’aux scrutins de novembre prochain, les enjeux locaux jouiront d’une plus grande visibilité offrant ainsi l’opportunité de promouvoir un portrait juste et objectif de la démocratie locale. Encore une fois, il ne s’agit pas d’être naïf ou complaisant, mais plutôt d’être honnête et de profiter de l’occasion pour présenter l’autre moitié du verre, celle qui est pleine. Et peut-être contribuer ainsi à contrer ce cynisme tant décrié. [1] Voir CHAMPAGNE, P. (2007). « Élections municipales 2005 : Portrait de l’élection sans opposition », Muni-Stat, Vol. 2, no 1, MAMROT, 6 p. (http://www.mamrot.gouv.qc.ca/observatoire-municipal/) * Ce texte a été publié dans le numéro Printemps 2017 de la revue CARREFOUR (Vol. 41, no 1).
1 Commentaire
5/25/2017 02:04:21 pm
Voilà un article qui remet les pendules à l'heure. Les données statistiques qu'on y retrouve sont encourageantes malgré les souhaits de plusieurs. Retrouver plus souvent dans les médias ce genre d'articles documentés aiderait à enrayer le cynisme.
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Septembre 2017
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